dimanche 25 septembre 2011

Lettre à Arezki Metref

J'ignore pourquoi vous autres berbéristes vous faites une crise d'hystérie à chaque fois qu'une personnalité politique parle des arabes sans évoquer les berbères y voyant un vilain complot international contre l'identité amazign.Je ne suis pas un grand fan de Sarkozy,loin de là,mais je trouve que voir dans le fait qu'il ait parlé à Benghazi de "jeunes arabes" comme un grave atteinte à la communauté berbère de Libye et ses droits culturels est à mon sens franchement grotesque.On n'a pas besoin d'être un arabiste extrêmiste pour comprendre que "jeunes arabes",c'est beaucoup plus court et ça passe mieux au journal de 20 heures que "Jeunes arabes,berbères,Toubous,Touaregs,noirs,turcs...".De plus,en parlant de "jeunes arabes",ils voulait très probablement parler des jeunes tunisiens,egyptiens,syriens,yemenites sortis dans la rue pour dénoncer la dictature,sinon il aurait parlé de "jeunes libyens".
et puis quel mal y a-t-il à parler "d'arabes" dans des pays (Algérie,Libye ou Tunisie) où l'écrasante majorité de la population n'éprouve aucune gêne à se considérer comme arabe?S'agit-il de reconnaitre les droits culturels légitimes des minorités linguistiques comme le stipule clairement le projet de constitution dont vous citez des extraits ou bien de berbériser de force la majorité de la population?
Mail envoyé en réponse à la chronique suivante parue dans Le Soir d'Algérie:


Chronique du jour : ICI MIEUX QUE LA-BAS
Les Berbères, dindons de la farce libyenne ?

Par Arezki Metref
arezkimetref@free.fr
Nicolas Sarkozy, père adoptif autoproclamé de la «Libye nouvelle», n'a laissé aucune chance à la… diversité. Abondant dans le sens du CNT dont l'orientation arabo-islamique dominante n'a presque rien à envier à celle de Kadhafi, il a défini ce qui doit dorénavant constituer la Libye : … arabe !
A Benghazi, le chef de l'Etat français s'est adressé aux...«Jeunes Arabes !» C'est à croire qu'il n'y a pas de Berbères en Libye, ou bien, s'ils existent, qu'ils ne sont que quantité négligeable dans la protestation. C'est évidemment tout le contraire. Quelque chose s'est passé sur le plan médiatique depuis le début du conflit. Aux premiers jours, la presse internationale évoquait le combat des Amazighs libyens dans le djebel Nefoussa et ailleurs en Libye. Puis, plus rien ! Il n'y en a plus que pour le CNT arabo-islamique et surtout pour sa branche quaïdiste incarnée par Abdelhakim Belhadj. Pourtant, avant un basculement dont l'origine doit probablement résider dans la prise en compte de la nature idéologique du CNT, nombre d'articles et d'images ont présenté les Berbères comme ces révolutionnaires de l'Ouest libyen qui couplaient dans le même combat la fin du régime Kadhafi et le renouveau identitaire amazigh en Libye. The New York Timeset The Weekly Standard US, The Guardian et The Economist britanniques, le journal espagnol ABCou même la chaîne de télévision qatarie Al Jazeera ont consacré de larges reportages aux insurgés des montagnes du Nefoussa et à leurs revendications dans le cadre de la «Libye nouvelle». Ainsi, avant même l'effondrement des troupes de Kadhafi, les insurgés ont envoyé depuis la ville de Yafren, haut lieu de la résistance anti-Kadhafi et de la revendication amazighe, un message au CNT. La lettre, écrite en tamazight et en arabe, formulait les aspirations que les combattants du djebel Nefoussa souhaitaient voir portées sur la future Constitution du pays libéré des billevesées du «Livre vert». Parmi ces exigences, la constitutionnalisation de deux langues, tamazight et arabe, en tant que langues officielles de la Libye. Mais visiblement la messe est dite puisque l'article 1 du projet de constitution rendu public par le CNT dispose que : «La Libye est un Etat démocratique indépendant dans lequel tous les pouvoirs dépendent du peuple. Tripoli est la capitale. L'islam est la religion. La charia est la source principale de la législation. L'Etat garantit aux non-musulmans de pratiquer leur rituel religieux. L'arabe est la langue officielle. Les droits linguistiques et culturels des Amazighs, des Toubous, des Touaregs et des composantes de la société libyenne sont garantis.» Exit ! Si ce projet représente une avancée indéniable par rapport à l’hystérie kadhafiste opposée à l'identité berbère de la Libye, il n'en demeure pas moins très en deçà des espoirs des combattants anti-Kadhafi du djebel Nefoussa. Voilà de quoi décevoir les militants des villes berbères de Yafren, de Nalut et de Jadu qui, comme pour rattraper 42 ans de déni identitaire, dès le début des combats, ont ouvert des classes pour enseigner enfin librement tamazight. Ils ont en outre constitué une force de sécurité pour se défendre et publié un journal hebdomadaire local, Tamusna (la connaissance, la sagesse). Tout un travail de recueil des doléances des Berbères a été réalisé par les leaders nefoussis pour que la langue tamazight soit l'égale de l'arabe dans une Libye démocratisée sur la base de la tolérance et du respect des droits de chacun. Ce n'est pas la première fois dans l'Histoire que les Berbères libyens se voient confisquer leur victoire. Ce furent essentiellement les tribus berbères qui conduisirent la résistance contre la conquête italienne de 1911. Pourtant, le royaume fédéral de Libye qui hérita du nom d'une tribu berbère, les Libous (sous l'Empire romain le nom Libye désignait l'ensemble de l'Afrique à l'ouest du Nil), constitué à l'indépendance du pays en 1951 sous la bannière du roi Idriss, chef de la confrérie des Senoussis, va se hâter de rejoindre la Ligue arabe en 1953. Le panarabisme galopant dans le monde arabe de l'époque n’épargnera naturellement pas la Libye, et ne tardera pas à générer des tensions internes entre les Berbères et le pouvoir central. Le coup d'Etat de Kadhafi en 1969, d'inspiration nassérienne, met en pratique une politique culturelle et linguistique exclusivement arabisée basée sur l'interdiction et la violente répression de la langue et de l'identité amazighes. Dès le début de son règne, Kadhafi arrête les militants amazighs, pour les emprisonner ou carrément les liquider. Ferhat Ammar Hleb, un ancien étudiant aux Etats-Unis, militant respecté de la cause berbère, fut pendu sur la place publique dans sa ville natale de Zouara en juin 1985. Il fallait faire un exemple. Echec de la barbarie dissuasive ! Ça n'a jamais empêché des centaines de jeunes Berbères de continuer à militer pour tamazight, narguant le féroce appareil policier de Kadhafi. La pratique de tamazight a été interdite en public par le «Guide». Les livres rédigés dans la langue originelle de la Libye furent brûlés en autodafés rappelant de sinistres précédents en Europe. Des tueurs du régime libyen assassinèrent jusque dans l'exil des militants berbères à l'instar des autres opposants. Jusqu'aux conversations téléphoniques en berbère qui étaient interceptées et réprimées. Pourtant, la population libyenne est constituée essentiellement de Berbères dont une bonne partie a été arabisée. La berbérité de la Libye est une certitude historique déjà énoncée par Hérodote (484 avant J.C.) Même si leur apport a été décisif dans la chute de Kadhafi, les Berbères de Libye vont-ils voir leurs revendications refoulées derrière les exigences stratégiques arabo-islamiques que les puissances de l'Otan partagent avec les régimes réactionnaires du monde arabe ? Espérons que non.
A. M.









Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire